lundi 6 septembre 2010

Loin dans la nuit

"Feed a cold, starve a fever", disent les anglais.
J'ai donc passé quelques matinées de la semaine dernière à nourrir mon coup de froid. A ne plus pouvoir en croiser un pörkölt sans en avoir des nausées. Il faut dire que, passé le mois d'août, le météo ne plaisante pas ici. C'est septembre, il est temps d'avoir froid! Je pourrais en faire un adage hongrois tellement les éléments mettent tout leur bon vouloir à me le confirmer d'année en année.

Alors pour se tenir chaud, on fait la fête, on bondit au son des groupes locaux, et on boit - la Russie a eu son heure d'influence ici. Bière à deux sous, vin dilué d'eau gazeuse - sacrilège inavouable pour un français en maraude -, et bien sur : palinka. Alors que la tolérance au volant est de 0,00 gr/l, il est difficile de s'extirper sobre de ces soirées réchauffées.
Le naturel hongrois à discuter avec le premier venu aidé de la fleur des boissons locales rendent ces nuits riches en rencontres. On se fait de nouveaux amis avant d'avoir eu le temps de finir son verre, et si la tour de Babel n'a pas tenue droit, c'est ici qu'elle a du s'effondrer. Des californiens, des allemands, des espagnols, un français et beaucoup d'autochtones y établissent des discussions bariolées et joyeusement polyglottes.
Dans ces milieux festifs de Budapest, les étudiants en affaires étrangères et les expatriés sont légions. La moyenne de multilinguisme des gens n'est pas le "0,5 langues parlées" de nos franchouillards compatriotes qui cherchent encore à se défaire des pièges de leur langue natale, mais plutôt un "2 ou 3 langues parlées". Avec quelques pointes à 5 ou 6 par tête. Évidemment, moi qui ne parle que français anglais couramment, un morceau d'allemand et petite tranche de hongrois, je ne me la ramène pas.

Rencontre d'un soir on d'un instant, toujours bon enfant. La plupart ne songent même pas à échanger numéro de téléphone ou adresse mail. "Kicsi a világ", le monde est petit, la ville plus petite encore. On se recroisera bien un de ces jours, ou une de ces années. J'ai vu ici des gens se rencontrer dans les situations les plus improbables, comme au fond d'un rade minable après quelques jours passés sur le même banc d'université des années auparavant, ou, plus rare, devant la scène d'un concert, chacun juché sur les épaules d'un acolyte. Dans ce deuxième cas, les embrassades furent digne d'un numéro de voltige équestre et le public entier s'est retourné en riant, au désespoir des musiciens.

Rencontres impromptues et naturelles, comme celle de cet étudiant germano-japonais, installé à Budapest pour deux ans de médecine. Il nous a aidé à faire traverser un pont à un ami - une histoire excessivement longue, à conserver pour les soirées d'hiver -, puis nous a accompagné dans notre promenade sur la colline Gellert, dans le vent et le froid de septembre. Nous ne nous sommes séparés que quelques heures plus tard, après des crèpes, du vin de Tokáj et un pictionnary digne des dictées de Pivot, et il s'est enfui au galop pour attraper le dernier métro. Quelques heures de compagnie et de drôles de discussions qui se sont effacées dans la nuit à pas de course. Tout juste j'ai retenu la phonétique japonisante de son nom: Kaïschin.

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