vendredi 18 mai 2012

Dans l'Arkhangaï

Tsetserleg.
Quelle forme d'étranger vient donc par ici? Quelle vision des occidentaux ont les mongols d'ici? Je suis actuellement le seul occidental. Ou je devrais plutôt dire, pour ne pas m'avancer trop, que les hotels et guesthouses que j'ai visités étaient vides et que je n'ai croisé aucun étranger dans la ville.
Tsetserleg est la capitale de l'aïmag*. La ville est annoncée dans les guides commes des plus jolies - ce qu'elle est. Elle abrite cinq ou six hotels et est une base de départ pour des trecks à cheval et à pied. Des touristes passent par ici, et pas qu'un peu. L'été, il faut réserver pour avoir un lit.

Et pourtant, les habitants me dévisagent comme si je sortais d'une soucoupe volante. Les adolescents me hèlent de loin puis rient dans mon dos. La caissière me montre le total du doigt avec un air fermé pour me demander de payer. La serveuse du petit restaurant part sans me regarder quand je lui demande si il est possible de manger - demande faite en mongol s'il vous plait - et fait signe à son collègue de s'occuper de moi.
Pourquoi ces regards de western et ces marques d'aversion? Je ne pense pas représenter pour eux autre chose que le touriste européen, mais que représente le touriste européen? De l'argent? De l'arrogance? Une occidentalité jalousée? Malgré mon apprentissage du mongol, malgré mon approche que je veux - et que j'éspère - très différente du tourisme-consommation, l'étiquette est des plus dures à décoller. Les touristes habituels se comportent-ils si mal que les mongols d'ici semblent les aimer si peu? Je me sens mouton au milieu des moutons du troupeau de l'ouest. Et ici, les moutons qui ne meurent pas dans la montagne, on leur tire le lait, on leur coupe la laine, puis on les abat pour les manger. Sombre perspective.

"Bayarlaa!" La serveuse me dit merci sur un ton presque enjoué.
Ou est-ce moi qui noircis terriblement le tableau de ce que je vis?

Parti pour de longues promenades en dehors de la ville. Quelques heures dans le vent, sur des collines où l'on ne cherche pas de chemin parce qu'il n'y en a pas. Mais où l'on a pas besoin de chemin parce que rien ne gène la marche. L'herbe rase recommence tout juste à repousser après la neige, les forets sont parsemées de cranes et d'ossements - tribus que l'hiver a prélevé aux troupeaux. Quelques heures de dialogue avec le soleil et le vent. J'avais besoin d'être seul avec les paysages. J'avais besoin de rencontrer les éléments et de demander à la terre mon permis de séjour. Car - un chaman vous le dirait - les vrais maitres des lieux ne sont pas les hommes.

Harhorin.
J'ai passé l'après midi à dessiner dans le monastère d'Erdene Zuu. A deux pas de là se dressait la première capitale en dur de l'histoire de la Mongolie : Karakorum. Il n'en reste aujourd'hui plus rien, ses pierres ont servies à construire les murs du monastère et ses cent stupas. Puis j'ai passé la soirée à discuter avec des français bien plus aventureux que moi. Et la matinée suivante à raccommoder mon pantalon qui avait un trou énorme au fondement.

Dans deux ou trois jours, je pars à cheval pour dix jours de steppe.



* division régionale de la Mongolie

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